Le trèfle à quatre feuilles

En 1968, Giancarlo Ciancimino signe pour Mobilier International une collection aussi élégante qu’ingénieuse : un mobilier modulable construit autour d’un profilé d’aluminium en forme de trèfle à quatre feuilles. 

Un symbole de modernité technique et d’équilibre esthétique.

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Mobilier International édite la collection « Trèfle » de Giancarlo Ciancimino

Une collection modulable signée Giancarlo Ciancimino pour Mobilier International

À la fin des années 1960, Mobilier International s’impose comme l’un des grands acteurs de la diffusion du design contemporain en France. L’entreprise, fondée par Théo et Michel Schulmann, introduit sur le marché français les créations d’Eames, Jacobsen ou Poul Kjærholm, tout en éditant ses propres modèles. 

Parmi eux, la collection imaginée par Giancarlo Ciancimino s’impose comme un exemple remarquable de rigueur technique et d’élégance structurelle. Son secret : un profilé d’aluminium extrudé en forme de trèfle à quatre feuilles, discret mais essentiel, qui devient le cœur du système.

Un principe constructif intelligent

Ce profilé en trèfle, véritable signature de la collection, combine simplicité d’assemblage et cohérence formelle. Relié à des traverses en aluminium pressé et anodisé naturel, il soutient les plateaux tout en permettant la suspension du corps des meubles. Ce système ingénieux assure une modularité sans précédent : les éléments peuvent être assemblés, démontés, reconfigurés sans outil complexe. 

Ciancimino développe ainsi un vocabulaire complet — tables basses, consoles, bureaux, meubles de rangement — où chaque pièce dialogue avec la suivante. La collection incarne cette idée chère aux années 60 : celle d’un mobilier rationnel, fonctionnel et adaptable, pensé pour la vie moderne.

Des matériaux à l’image d’une époque

Dans l’esprit de son temps, le système accueille différents plateaux interchangeables, qui permettent de jouer avec les contrastes de matière. Le verre fumé, simplement posé sur le piètement et isolé par des plots de caoutchouc, introduit une transparence légère et presque aérienne. 

Le marbre encastré dans les traverses évoque la noblesse du matériau et la durabilité. Quant aux placages de noyer ou de palissandre verni, ils rappellent l’héritage artisanal et la chaleur du bois dans un contexte d’industrialisation du meuble. 

Ce dialogue entre aluminium industriel et finitions naturelles illustre parfaitement les tensions créatives de la fin des Trente Glorieuses, où la modernité s’accompagnait encore d’un souci de confort et d’élégance.

Une esthétique architecturale

Les proportions maîtrisées et la rigueur géométrique des meubles de Ciancimino évoquent un langage architectural plus qu’un simple design d’objet. Le piètement en trèfle, visible et assumé, devient un motif graphique à part entière.

L’ensemble dégage une impression de solidité, presque de monumentalité, tout en conservant une grande légèreté visuelle. Cette dualité — entre structure apparente et sobriété décorative — incarne la philosophie du Mobilier International : proposer au grand public des meubles modernes, modulaires et raffinés, capables d’habiter aussi bien un salon privé qu’un espace de travail collectif.

Héritage et postérité

Aujourd’hui, la collection « Trèfle » de Giancarlo Ciancimino témoigne d’un moment de l’histoire du design français.

Elle reflète l’ambition d’une époque où le mobilier devenait à la fois architecture, système et esthétique. 

Sa simplicité constructive, sa logique modulaire et sa beauté fonctionnelle continuent d’inspirer collectionneurs, qui voient dans ces créations l’une des expressions les plus pures du modernisme tardif.

 

Achille

The details are not the details. They make the design.

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